UN DRAME QUI RÉVÈLE UN SECTEUR À BOUT DE SOUFFLE... IL EST URGENT DE REFINANCER L’AIDE AUX PERSONNES SANS-ABRI!
Un drame d’une grande gravité s’est déroulé ce 12 novembre 2025 dans un service d’accueil de jour à Nivelles, faisant une victime et un travailleur social grièvement blessé.
L’ARCA, avec le soutien de l’AMA, exprime sa profonde solidarité à la famille de la victime, ainsi que son soutien aux équipes concernées, et plus particulièrement au travailleur blessé. Cet événement bouleverse l’ensemble du secteur !
Un drame exceptionnel… dans un contexte qui ne l’est plus !
Il est essentiel de rappeler que la grande majorité des personnes sans-abri ne sont pas violentes. Mais les services sont aujourd’hui confrontés à des situations de plus en plus complexes, mêlant troubles psychiatriques, assuétudes, isolement extrême et absence de solutions spécialisées disponibles.
Les violences graves restent rares, mais les tensions, menaces, agressions et situations critiques se multiplient.
Ce n’est pas la conséquence d’un service défaillant : c’est le symptôme d’un système saturé et sous-financé, où les refus successifs dans les services spécialisés — notamment en santé mentale ou en assuétude — s’accumulent. Les services d’aide aux personnes sans « chez-soi » se retrouvent ainsi à accompagner des personnes dont la détresse s’aggrave et se complexifie, dans un contexte où le nombre de demandes dépasse largement les capacités d’accueil. Les équipes manquent à la fois de temps et de moyens pour répondre de manière adéquate à cette réalité qui se durcit.
À ces tensions déjà structurelles vient désormais s’ajouter la réforme du chômage, qui va augmenter significativement le nombre de personnes en situation de grande précarité. Les services d’aide aux personnes sans-abri sont le dernier filet de sécurité de notre société : si l’on veut réellement ne laisser personne de côté, il faut leur donner les moyens d’assumer cette mission d’intérêt public.
Car c’est bien de cela qu’il s’agit : les accueils de jour, abris de nuit, maisons d’accueil et maisons de vie communautaire ont la mission — confiée par la Région — d’assurer, entre autres, un accueil inconditionnel, y compris pour les personnes exclues de partout ailleurs. Mais cette mission essentielle, profondément humaine et indispensable pour garantir la dignité de chacun, est clairement sous-financée, ce qui crée automatiquement des tensions sur le terrain. Comment accueillir dignement et en sécurité quand les moyens alloués sont aussi éloignés des besoins ?
Les chiffres parlent d’eux-mêmes :
- 45.000 à 65.000 € par an pour un accueil de jour, parfois fréquenté par plus d’une centaine de personnes par jour ;
- 4.000 € par place et par an pour les abris de nuit, soit 80.000 € (un peu plus d’un·e travailleur·euse) pour accueillir 20 personnes 365 nuits par an ;
Ces montants dérisoires ne permettent ni de garantir la sécurité des travailleur·euses et des bénéficiaires, ni d’assurer l’accompagnement nécessaire auprès d’un public dont les besoins explosent.
À cela s’ajoute un autre problème majeur : l’absence totale de visibilité budgétaire pour les années à venir. À la mi-novembre, les services ne connaissent toujours pas les montants dont ils disposeront en 2026. Certains services ne savent pas s’ils pourront maintenir leur personnel : des licenciements doivent parfois être envisagés, faute de garanties financières. En outre, les subsides sont payés très tardivement, obligeant les services à financer leur personnel sur fonds propres. Et s’ils n’ont pas de trésorerie, ils doivent se débrouiller… On fragilise ainsi un secteur déjà grandement précarisé.
Cet été, un accueil de jour et un abri de nuit ont fermé définitivement leurs portes suite à des faits de violence, faute de moyens suffisants pour protéger leurs équipes. Si d’autres services devaient suivre, une question simple mais vertigineuse se pose :
Que fera-t-on des personnes qui n’auront alors plus aucun lieu où aller ?
Dignité et sécurité ne s’improvisent pas : refinancer le secteur maintenant !
Alors que le Gouvernement wallon présente la semaine prochaine plusieurs plans liés à la pauvreté et au sans-abrisme, nous appelons à une cohérence réelle entre les ambitions annoncées et les moyens accordés.
Comme elles le rappellent depuis des semaines dans le cadre de leur campagne “Mode d’emploi pour sortir du sans-abrisme”, au cours de laquelle elles ont tiré inlassablement la sonnette d’alarme, les fédérations ARCA et AMA demandent aujourd’hui, plus que jamais, à être enfin entendues :
- Un refinancement urgent et structurel de l’ensemble des services d’aide aux personnes sans-abri, et plus particulièrement des services d’accueil de jour et des abris de nuit, pour disposer des moyens nécessaires dédiés à la sécurité : personnel suffisant pour assurer l’encadrement, formations adaptées, dispositifs/matériels adéquats et collaborations renforcées avec les services spécialisés.
- Une anticipation des effets de la réforme du chômage, qui va considérablement accroître la pression sur les services.
- Une gestion financière et administrative efficace et simplifiée pour permettre une meilleure gestion institutionnelle.
- Une rencontre rapide avec le Ministre des Solidarités visant à construire, de manière concertée, une réponse collective à la gestion des publics aux profils complexes, en clarifiant les responsabilités et en définissant les moyens, dispositifs et procédures nécessaires pour réduire les risques et soutenir réellement les services de première ligne, qui ne peuvent continuer à porter seuls ces situations.
Aidez les personnes sans-abri et protégez les équipes !
Nos services constituent le dernier filet de sécurité pour des milliers de personnes en grande vulnérabilité. Les équipes s’engagent chaque jour avec humanité, professionnalisme et courage.
Mais elles ne peuvent plus continuer au péril de leur propre sécurité, physique et mentale, et sans les moyens nécessaires pour accompagner dignement un public en détresse croissante.
Nous appelons le Gouvernement wallon à agir sans délai pour prévenir de nouveaux drames et garantir un accueil digne, sécurisé et inconditionnel.

